Quand les récits politiques balayent les savoirs scientifiques : retour sur un mois de juillet édifiant.
Bonjour tout le monde 👋,
C’est Romain de snooze, la newsletter qui décrypte tous les 15 jours un mythe moderne ancré dans notre quotidien.
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Qu’est-ce qui compte le plus aujourd’hui, les savoirs ou les histoires ?
Prenons deux exemples très récents.
Début juillet, sept prix Nobel d’économie signent une tribune pour expliquer que les ultra-riches paient moins d’impôts que les cadres supérieurs (en proportion de leurs revenus réels) et que leur patrimoine est anormalement concentré (les milliardaires français détiennent près de 30 % du PIB du pays, contre 14 % à l’échelle mondiale).
« Avec l’impôt sur les ultrariches, la France peut montrer la voie au reste du monde » plaident-ils et à ceux qui crient à l’exil fiscal, ils écrivent : “Ni l’expérience historique, ni les savoirs économiques ne leur donnent raison.”
Ça semble clair, qu’en disent les ministres ?
Amélie de Montchalin, la ministre des comptes publics, s’est opposée mercredi dernier à ce type d’impôts.
Son histoire ? C’est un impôt “très injuste”qui va forcer les entrepreneurs français à “prendre le TGV.”
On s’en sort pas si mal, ça aurait pu être l'avion…
Autre exemple, la fameuse loi Duplomb sur la réintroduction des pesticides adoptée sans débats sur le fond en séance publique.
La semaine dernière Le Monde a rappelé que vingt-deux sociétés savantes médicales, la Ligue contre le cancer, l’Agence nationale de sécurité sanitaire, la Fondation pour la recherche médicale, vingt mutuelles et groupes mutualistes, la Fédération des mutuelles de France, le Conseil scientifique du CNRS, la Fédération des régies d’eau potable ainsi que des centaines de médecins et de chercheurs se sont mobilisés contre cette loi considérée comme dangereuse.
Depuis le 10 juillet, des millions de français, inquiets pour leur santé, les écosystèmes et le développement d’une agriculture durable ont rejoint le mouvement en signant une pétition.

Elle devrait atteindre les 2 millions de signatures cette semaine (record national).
Ça semble clair, qu’en disent les ministres ?
Sophie Primas, la porte-parole du gouvernement s’est lancée. Son histoire ? « Peut-être n’avons-nous pas assez expliqué et rassuré». « Il ne faut pas affoler la population » a-t-elle ajoutée.
😮
Les histoires sont plus faciles à écouter que les savoirs. Mais elles sont aussi plus faciles à contredire.
Raison de plus pour en déconstruire quelques-unes sur la route des vacances…
Histoire #1
📌 Ce qu’on croit :
Refuser une loi, bloquer une usine ou décrocher un portrait, c’est bafouer la République et menacer l’ordre commun.
☝️ Pourquoi c’est faux :
La désobéissance civile est un mécanisme de correction démocratique. C’est parfois le seul moyen de faire entendre les savoirs quand le récit officiel les nie.
📖 Un snooze pour aller plus loin :
#12 - La désobéissance civile : pour ou contre la démocratie ?
Histoire #2
📌 Ce qu’on croit :
L’entrepreneur est un rebelle visionnaire qui change le monde à lui seul.
☝️ Pourquoi c’est faux :
C’est un récit bien rôdé, nourri de capital social, d’aides publiques, de storytelling calibré et de mythes fondateurs. En réalité, la réussite entrepreneuriale est collective, située et largement dépendante des infrastructures déjà en place.
📖 Un snooze pour aller plus loin :
#7 - le mythe de l’entrepreneur visionnaire
Histoire #3
📌 Ce qu’on croit :
Les prix disent la vérité, les marchés sont rationnels, les régulations les empêchent de fonctionner correctement.
☝️ Pourquoi c’est faux :
Le marché est une construction sociale, chargée d’idéologie, souvent sourde aux limites écologiques ou sanitaires. Il ne corrige pas le réel, il l’ignore.
📖 Un snooze pour aller plus loin :
#8 - Le marché, une réalité universelle ?
Histoire #4
📌 Ce qu’on croit :
Nous élisons nos représentants, donc nous décidons.
☝️ Pourquoi c’est faux :
Les décisions les plus structurantes sont prises par des non-élus, des institutions ou des intérêts privés. L’élection ne garantit pas le pouvoir d’agir sur les grands choix collectifs : elle masque souvent une certaine dépossession politique.
📖 Un snooze pour aller plus loin :
#26 - Vit-on vraiment en démocratie ?
Histoire #5
📌 Ce qu’on croit :
La nature est extérieure, environnante, vulnérable. Notre rôle serait de la protéger, comme un bon gestionnaire veille sur son jardin.
☝️ Pourquoi c’est faux :
La “nature” telle qu’on la conçoit est une invention moderne qui sépare artificiellement l’humain du reste du vivant. Tant qu’on la considère comme un décor ou une ressource, on perpétue un rapport de domination qui rend toute cohabitation impossible.
📖 Un snooze pour aller plus loin :
#2 - La nature, un récit pas si ancien
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